Corée: de l’amour jusqu’à la frontière…


Vidéo par Isabelle

Nous quittons Delhi et décollons via Dubaï pour Seoul. Dans les journaux offerts à l’embarquement, nous découvrons plusieurs reportages sur notre passage en Inde.  Après une nuit dans l’avion, nous sommes accueillis par nos amis coréens, avec comme d’habitude, banderoles, bouquets de roses et mini-bus. Ce que nous voyons de Séoul nous surprend agréablement. Ville propre, organisée et moderne. Quel contraste après l’Inde! La cerise sur le gâteau pour notre équipe qui avait à peine mangé depuis 4 jours, c’est le festin préparé par les pacifistes coréens. Une table basse couverte de mets délicats et frais sur lesquels nous nous ruons le plus “humainement” possible. Nos hôtes sont soignés et cravatés et je salue toute la sensibilité et le respect coutumier des peuples d’Asie. Nous mangeons en tailleur et avec des baguettes.  Pour beaucoup d’entre nous, épuisés, c’est une résurrection! Nous nous présentons les uns aux autres, membres de l’équipe de base et diverses associations pacifistes sud-coréennes.

Encore une belle surprise nous attend: une nuit zen dans un temple bouddhiste entouré de lampions multicolores. Dodo à même le sol et cela passe fort bien. Pour la première fois depuis 12 jours, je dors 5 heures d’affilée, un record! Petit-déjeuner d’algues et de poissons, thé vert et pain aux raisins.

Nuit zen au temple bouddhiste

Nuit zen au temple bouddhiste

Nous partons visiter la zone démilitarisée entre les deux Corées. Il s’agit-là d’un événement exceptionnel car c’est la première fois que des étrangers sont autorisés à s’y rendre. A quelques mètres des fils de fer barbelés, une vieille paysanne laboure depuis 48 ans le même champ.  Elle a perdu sa famille pendant la guerre. Elle évoque avec nostalgie le temps où elle allait pêcher librement sur le fleuve Han, à quelques mètres. Aujourd’hui, le fleuve est devenu une prison, clôturé par des fils de fer barbelés sur plusieurs kilomètres. C’est triste de voir un fleuve déserté par la vie humaine à cause de la folie des hommes. Je n’y ai même pas vu un oiseau s’y poser… La rivière Han fait plusieurs kilomètres de large. Elle est grise, sombre et boueuse. On dirait qu’elle pleurt l’absence de rire et de couleurs apportées par les rencontres.

Athmosphère extraordinaire avec nos amis coréens

Athmosphère extraordinaire avec nos amis coréens

Dans l’après-midi, nous participons à une table-ronde organisée par les pacifistes coréens en présence d’autorités régionales. Plusieurs Coréens nous partagent la peine qui les affectent encore et combien ils rêvent d’une Corée unie où ils pourraient retrouver leur famille ou leurs amis qu’ils ne peuvent observer aujourd’hui qu’au télescope. Encore faut-il y glisser la petite pièce du salut pour une minute de bonheur où le regard se pose sur un paradis perdu. Tous les contacts sont interdits entre les deux pays et c’est une chose bien étrange de voir deux Nations plongées dans le mutisme total à l’ère d’Internet, des emails et des téléphones portables. Selon les humeurs des dirigeants de part et d’autre, il arrive que des réunions familiales soient organisée une fois tous les trois ans…
Je prends la parole pour leur apporter mon soutien et leur dire combien ce drame qui m’était étranger jusque-là m’est devenu personnel. A la fin de mon intervention, un Coréen s’est approché de moi et m’a serré dans ses bras, en silence. Cela m’a tellement touchée que mon coeur s’est mis en joie. Ne pouvant pas leur apporter bien plus qu’un moment de joie, j’ai décidé d’ inviter toute l’assemblée à danser! Et les Coréens se sont laissés faire de bonne grâce… Ils se sont même beaucoup amusés et quel bonheur d’avoir contribué à leur faire oublier quelques instants la division profonde qui coupe le coeur de la Nation coréenne en deux. “C’est la première fois de ma vie que je vois des Coréens danser la farandole!” s’exclame ravie une jeune belge d’origine coréenne.

Nous continuons à danser comme des fous. Et puis vient l’heure de nous quitter. Nous nous saluons et plusieurs femmes viennent me dire au revoir. L’une d’entre elle me sert contre son coeur avec une douce force qui m’émeut aux larmes. Elle me fait contacter en quelques seconde ce que je suis venue chercher: l’unité entre tous les hommes. C’est la deuxième inconnue qui me prend spontanément dans ses bras depuis le début de mon voyage, en silence. L’une et l’autre m’ont mise en contact avec la force prodigieuse des femmes et leur sens de la solidarité entre nous et de la compassion. Les Coréennes se soir sont belles, gracieuses et bienveillantes avec nous autres femmes d’Occident. Je lis dans leur regard une profonde gratitude d’être venu jusqu’à elles, en Corée. Moi, je goutte à cette énergie d’amour qui coule à l’identique dans nos veines qu’elles soient d’Asie, d’Europe ou des quatre points cardinaux.

Belle complicité de femmes

Belle complicité de femmes

Je quitte la fête émue. Nous rentrons au temple sous des trombes d’eau. Je me replie dans ma cellule de moine où je monte la vidéo sur la Corée et écris mon communiqué de presse du jour. Je constate que je ne suis jamais sur les photos parce que je filme, comme Alvaro, le cameraman officiel de la Marche. Je me dis que cela est sans importance dès lors que je me sente utile et que j’ai trouvé ma place sur la grande photo d’un monde meilleur auquel j’aspire tant.

La vidéo officielle par Alvaro Orus

One Response to Corée: de l’amour jusqu’à la frontière…

  1. Luc 18 octobre 2009 at 22 h 47 min #

    Where The Hell is Isabelle, j’ai vu ta petite danse en Corée et j’ai compris (tu refais le voyage de Matt !)
    C’est d’ailleurs du bonheur te te voir sauter de pays en pays à cette vitesse!!
    (je dois te dire que je suis également Bluffer par la qualité de tes vidéos, et de tes reportages !! Bravo et merci on a l’impression d’être avec Vous)
    On t’embrasse tous très fort!, depuis la Sologne un dimanche d’automne ensoleillé !!