Fuertaventura: une marche, une plage, des touristes et beaucoup de questions…

fuerteventuraAprès les boulevards de New Delhi, Paris et Tokyo, quelle curieuse impression que de se retrouver parachutés au bord d’une plage bondée de touristes allemands! Après un moment de partage avec des enfants d’une école primaire qui nous ont posé diverses questions sur notre expérience, nous avons rejoint la marche du jour, accompagnés de la fanfare locale. Il y avait quelque chose de surréaliste dans cette juxtaposition de  deux communautés si différentes: du côtés des marcheurs, une majorité de jeunes, d’enfants et de résidents espagnols en mouvement et dans une dynamique de changement; du côté de la plage, une horde de retraités allemands plongés dans une douce torpeur immobile, un repos surement mérité après des années de labeur. Ici, la vieillesse qui regarde avec amabilité; là, la jeunesse qui lui sourit avec espièglerie. Je me suis demandé si je serais un jour l’un de ces vacanciers, à faire de ma chaise longue et de mon parasol la destination absolue de mes rêves et de ma vie… Et s’ils avaient raison de ne partir à la conquête que d’une rayon de soleil, un peu de chaleur et le frémissement des vagues sur leur peau patinée…

Faut-il absolument  agir, passer à l’action solidaire, se mettre au service des autres pour donner du sens à sa vie et apprendre à s’aimer? Est-ce que le jardinier qui parle à ses fleurs sans jamais passer le portail de sa maison ne fait-il pas autant pour le monde que nous autres, à courir après la paix en traversant 100 pays? “Mais où cours-tu? Ne vois-tu pas que le ciel est en toi?” écrivait Christiane Singer. Est-ce que l’employé de commune qui déneige avec patience et dévouement une route de montagne n’apporte-t-il pas aussi son lot d’amour à l’univers? Une petite retraitée qui donne chaque jour des graines aux oiseaux ou une caissière qui sourit avec générosité à sa clientèle ne sont-elles pas à leur manière des servantes de la paix? Plus je marche plus je me dis que ce ne sont pas nos pas qui vont changer quelque chose mais la manière avec laquelle nous mettons un pas devant l’autre et comment nous transformons à travers notre expérience.

J’ai vu et entendu des “manifestants pour la paix” hurler  des slogans pacifistes avec la violence d’un bourreau. J’ai vu des personnes marcher en téléphonant à leur banquier pour connaître le cours de la bourse ou en médisant sur quelqu’un ou critiquant quelque chose avec véhémence. J’en ai vu marcher pour la paix alors qu’ils se sont vantés de resquiller dans les transports publics ou d’emprunter de l’argent qu’ils ne rendront jamais. J’en ai vu marcher avec nous mais ne prendre soin ni de leur corps ni de leur hygiène. J’en ai vu qui bousculaient d’autres marcheurs pour être au centre des photos et qui se sont servi de la Marche au lieu de la servir… Quand je vois cela, je me demande: et moi, qu’est-ce que je mets dans mes pas? En quoi mon comportement peut-il nuire ou être profitable à autrui? Quelle est la qualité de l’empreinte que je laisse derrière moi, par mes pensées, mes gestes et mon attitude en général?

Nous marchons tous sans exception. Dans le métro comme à Fuertaventura… Et la seule question que j’ai envie de me poser est: quelle intention est-ce que je mets dans mes pas? Est-ce que je suis présente à moi-même quand je marche? Est-ce que je goûte à ce qui se passe dans mon corps en cet instant? Quels sont mes ressentis et quelles est la nature de mes émotions? Est-ce que je réalise que vivre s’étend bien au-delà de respirer, manger, travailler et dormir? Est-ce que j’ajoute de la vie à la Vie?

Personnellement, je marche de moins en moins pour changer le monde et de plus en plus pour sentir palpiter la vie en moi et transformer, par la gratitude, tout ce que je touche. Et si la matière n’attendais que cela? Que nous l’a touchions avec révérence pour l’embellir?

J’aimerais conclure ces lignes en remerciant tous ceux qui laissent de merveilleux commentaires de soutien et d’encouragement sur mon blog. Ils me donnent des ailes et me rendent encore plus amoureuse des humains. Ne contribuent-ils pas par leurs mots à pacifier l’humanité, eux aussi? « La seule façon de faire grandir l’humanité, c’est de la rendre amoureuse d’elle-même en montrant sa beauté… » C’est bien l’unique mission que je veux donner à mes semelles…

2 Responses to Fuertaventura: une marche, une plage, des touristes et beaucoup de questions…

  1. Christine 25 novembre 2009 at 20 h 19 min #

    Isabelle, merci infiniment pour tes réflexions si profondes et de nous les faire partager. Ca résonne en moi, ça connecte de façon si juste, je te sens en totale cohérence, tu accomplis une marche intérieure qui me semble tout aussi importante que la marche physique. C’est beau ! Et ce que tu fais tu le fais pour nous aussi, c’est inéluctable. Comme dirait un copain “tu suis et tu es ton chemin”, à la première personne, c’est le même verbe… chacun marche à sa façon, et toute “marche” est utile pour peu que l’amour soit sa principale motivation !

  2. Colette Hein Vinard 25 novembre 2009 at 20 h 50 min #

    A nouveau merci , encore plus fort que toutes les autres fois, pour cette profonde réflexion, Isabelle amie.
    Comme toi, je suis de plus en plus certaine que le changement ne vient pas des gouvernements, ni des lois qu’ils édictent, mais de l’éveil de chacune de nos consciences, et du changement que celles-ci induisent dans nos vies. La paix imposée de force ne réussit jamais définitivement: le feu couve sous la cendre… Mais la paix vécue sincèrement dans la profondeur de nos coeurs rayonne autour de nous. C’est un fait. Et comme tout est lié, ce rayonnement se répand comme une onde dans l’Univers et élève le taux vibratoire de toute la Création. En toute modestie!!! A nous d’arriver à concevoir la pensée positive comme un acte concret, une forme d’énergie extrêmement puissante, et à y travailler tous les jours, où que nous soyons, sans nous attacher au résultat…

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